Bestiaire médiéval de V à Z
Vouivre
La Vouivre est une créature
fantastique mythologique. Sous sa forme la plus pure, la Vouivre est un serpent
ailé aux mœurs nocturnes et solitaires qui porte au front ou à l'extrémité
d'une sorte d'antenne une énorme pierre précieuse (le plus souvent un rubis,
parfois un diamant) appelée "escarboucle
Elle vit généralement dans les
régions montagneuses est particulièrement présente dans la mémoire populaire
jurassienne.
Elle passe la plus grande partie
de son temps sous terre mais fréquente aussi les milieux aquatiques. C'est là qu'elle
va boire ou se baigner. Le reste du temps, la Vouivre veille sur les
trésors souterrains. La
Vouivre apprécie les lieux peu habités comme les marais ou
les grottes.
Elle porte une escarboucle sur le
front. Cet œil, une gigantesque pierre précieuse, est parfois caché dans les
roseaux des berges d'une rivière ou d'un lac tandis que la Vouivre y pêche, et peut
être subtilisé par un voleur audacieux ; ce qui lui assure d’être riche et
heureux. Cette pierre est tellement brillante que lorsque la Vouivre vole, elle laisse
derrière elle dans la nuit une traînée de feu.
La « Vouivre » aurait été
primitivement un « serpent de feu » et non pas un serpent d'eau. Cette légende
expliquerait pourquoi les Vouivres ont des ailes et portent au front une
escarboucle étincelante, c'est-à-dire un charbon ardent, en latin carbonculus ;
quand elles plongent dans les fontaines ou dans les puits, elles laissent leur
escarboucle sur la margelle. Il y a là une association de la « Vouivre » avec
une idée de lumière et de chaleur sortie des entrailles de la terre ; aussi,
traditionnellement la Vouivre
garde-t-elle les trésors souterrains. Souvent d'ailleurs la Vouivre crache le feu.
La Vouivre est un dragon, il
n'y a pas de règle distinguant Vouivre et dragon par le nombre de pattes ou
d'ailes. Un dragon est une créature mythique, dont l'apparence ne dépend que de
son créateur.
La « Vouivre » et la « wyverne »
ne paraissent pas être exactement la même créature, car les définitions
n'insistent jamais sur les mêmes choses, selon la langue. Les définitions
suivantes ont été créées en comparant de nombreux dictionnaires français et
anglais. On constatera qu'elles sont différentes l'une de l'autre :
Dans les contes populaires et en
héraldique, la Vouivre
est un serpent fantastique préposé à la garde d’un trésor possédant un corps de
serpent, des ailes de chauve-souris et des pattes de pourceau.
Marcel Aymé décrit dans La Vouivre une jeune femme
nue vivant au milieu des marais et protégeant un énorme rubis. Cédric Vincent,
quant à lui mélange les deux versions ; il imagine la Vouivre comme un esprit
lié à l'eau, qui se présente aux humains sous l'aspect d'une femme lorsqu'elle
est heureuse, d'un dragon à deux pattes lorsqu'elle est en colère. Henri
Vincenot quant à lui voit la
Vouivre comme un immense serpent souterrain qui correspond au
courant tellurique terrestre dans son ouvrage Les étoiles de Compostelle.
Bernard Clavel a écrit un conte
sur la Vouivre,
présent dans le recueil : Légendes des lacs et des rivières.
Vouivre, en franc-comtois, est
l'équivalent du vieux mot français « guivre », qui signifie serpent et qui est
resté dans le langage du blason.
Dans les contes populaires et en
héraldique anglais, serpent fantastique possédant deux pattes, deux ailes et
une queue hérissée de pointes.
En héraldique anglaise, la «
wyvern » est un dragon ailé à deux pattes.
En Italie, la « guivre » est un
serpent en pal ondoyant, engloutissant un enfant (l'« issant »). Elle est assez
répandue, notamment à Milan où elle représente le symbole de la famille
Visconti, dont une des légendes veut qu'un des membres de cette famille (Ottone
Visconti), alors commandant dans la croisade de 1187, prit ce symbole sur
l'étendard d'un Sarrasin vaincu par lui. Il rapporta ce trophée à Milan qui
devint un des symboles de la ville, connu sous le nom de « Biscione » ou «
bissa » en patois milanais qui est la traduction de « vipère ».
Une autre légende veut que vers
1200, ce fut un autre Visconti qui tua un serpent ou dragon qui terrorisait les
habitants. Ce symbole a été repris sur l'écusson de la marque d'automobiles
Alfa Romeo fondée à Milan, sur les maillots de l'équipe de l'Inter de Milan et
repris par la société Fininvest de Silvio Berlusconi avec une légère
modification (l'enfant est remplacé par une fleur).
Aspects folkloriques
Monstre folklorique, la Vouivre fait pourtant
partie intégrante, depuis des siècles, du patrimoine de plusieurs pays
européens (Angleterre, France, Suisse notamment).
Souvent les traditions se
perdent, même en Franche-Comté, le réel noyau de la légende. Il n'y a plus
depuis la seconde moitié du XXe siècle d'histoires rapportées oralement à
propos d'une Vouivre ou d'une personne qui a tenté de s'emparer de sa pierre
précieuse (escarboucle). Mais ce qui demeure surtout sont les noms des
lieux-dits, dérivés de Vouivre.
Tous les vingt ans se célèbre à
Couches (Saône-et-Loire) la fête de la « Vivre », en l’honneur d’un monstre qui
semait la terreur. La légende remonte à 1328 et la prochaine fête sera en 2028.
La fontaine à chagrin entre
Lacrost et Préty en Saône-et-Loire porte le souvenir de la Vouivre de Lacrost.
Une Vouivre figure sur le drapeau
de l'Ajoie, un district du canton du Jura en Suisse. Dans cette région, la
tradition de la Vouivre
est vivace.
L'escarboucle ou l'œil unique
De nombreuses Vouivres sont
représentées comme une sorte de dragon ailé qui porte une escarboucle sur le
front. Cet œil, une gigantesque pierre précieuse, est parfois caché dans les
roseaux des berges d'une rivière ou d'un lac tandis que la Vouivre y pêche, et peut
être subtilisé par un voleur audacieux.
Cette pierre a fasciné les
hommes. Leur convoitise se retrouve dans de nombreuses légendes de nos
provinces et les amène à la tuer pour s'emparer du diamant comme dans les
contes similaires du Cantal, du Puy-de-Dôme, de Vienne, de Basse-Normandie, de
Bresse, du Revermont… Paul Sébillot, dans Le Folklore de France, a recensé
beaucoup de légendes ainsi qu’Henri Dontenville dans son Histoire et géographie
mythiques de la France.
À Brétigny en Côte-d'Or, « Lai
Sarpan du Bois du Roz » avait une couronne sur la tête, un œil de diamant, des
écailles brillantes et sonores et un anneau à la queue.
Dans le conte, Le Serpent au
diamant, le bûcheron qui dérobe l’escarboucle apprend de la bouche du roi
qu’elle a le pouvoir de transformer le fer en or.
Les montagnes des Alpes et du
Jura, un serpent volant aux proportions énormes, appelé Vouivre, portait sur sa
tête une aigrette ou couronne étincelante, et sur le front un œil unique,
diamant lumineux qui projetait une vive lumière que l'on voyait de très loin.
Lorsqu'elle voltigeait avec bruit de mont en mont, une haleine de flammes et
d'étincelles sortait de sa bouche.
Selon la légende, on voyait jadis
dans les forêts de Luchon de grands serpents qui avaient une pierre brillante
sur le front.
La « Male Beste » des bords de la Garonne est aussi dotée au
front d'un seul œil.
Une apparence variable selon les régions
Les serpents volants ne sont pas
rares. Tels ceux du château de la
Fraudière à Jouhet (Côte-d'Or) et de Presly (Cher), la
serpente volante du château de Rosemont à Luthenay-Uxeloup (Nièvre), la
couleuvre volante du château de la Motte-Chevagnes (Allier) entre autres.
Toutefois, la Vouivre peut avoir
d'autres formes : on conte que les habitants du Valais se débarrassèrent d'un
monstrueux serpent nommé la
Ouïvra qui enlevait les bestiaux de la montagne de Louvye… La Ouïvra avait une tête de
chat sur un corps de serpent…
Dans le Berry, grand serpent de
quarante pieds de longueur se réveillait de temps à autre ; sa tête était celle
d'un homme.
En Vendée, la fée Mélusine,
trahie par son amant, s'envole sous la forme d'un gigantesque serpent ailé en
ordonnant que le huitième de ses dix fils soit tué pour mettre fin aux guerres
ravageant le pays.
Dans le Mâconnais, on parle de la
bête Faramine, monstre « faramineux » qui volait d'un coup d'aile de la Roche de Solutré jusqu'à
Vergisson, ou bien encore de Thouleurs jusqu'à la pierre de la Wivre du mont Beuvray.
Toutefois, la Bête
Faramine de Vergisson, qu'on appelle aussi « le Peteu » a
perdu tout caractère reptilien : elle est présentée comme un oiseau
gigantesque, du moins en apparence, puisque, une fois tuée et plumée, la bête
ne s'avère pas plus grosse qu'un poulet. La bête Faramine est aussi connue dans
le Poitou où on l'orthographie « bête Pharamine ».
Le « Dard » du sud de la Gâtine avait le corps d'un
serpent à queue très courte et quatre pattes, une tête de chat et une crinière
tout le long du dos. Son sifflement faisait peur. Lorsqu’il était attaqué, il
mordait cruellement, mais il n'était pas venimeux. Cependant, il avait coutume
de téter les vaches.
L'eau
La forme du serpent pourrait
peut-être rappeler celle des méandres d'une rivière sauvage ; l'élément
aquatique est en tout cas très fréquent dans les légendes de Vouivre :
George Sand décrit dans Légendes
rustiques le Grand Serpent des étangs de la Brenne, près de Saint-Michel-en-Brenne. À
Gargilesse, lieu de prédilection de George Sand, la Vouivre prend le nom de
Gargelle.
En Vendée, la Vouivre hantant le Grand
Etier et la Vie
est décrite comme « une forme longue et gracieuse, qui semble hésiter entre un
corps de femme et de serpent, se baigne en sirène et se meut dans l'eau mieux
qu'une anguille ».
Les légendes locales gardent le
souvenir de la Vouivre
de Blamont (Doubs) qui lavait ses ailes brillantes à la source de la Fuge, de celle qui hantait
les forêts du mont Bleuchin (Doubs), de celle de Gémeaux (Côte-d'Or) qui se
baignait dans la fontaine Demelet, de celles encore de Couches-les-Mines (Saône-et-Loire),
de Vitteaux (Côte-d'Or), de Beaulon (Allier), de Fleury-sur-Loire (Nièvre)…
Apparitions annuelles et trésors
Très souvent, la Vouivre veille sur les
trésors souterrains comme le montrent de nombreuses légendes du Nivernais. À
Moraches, on conte qu’un serpent gardien d’un trésor, ne sortait qu’une fois
l’an pour aller boire.
Sous la pierre de Vaivre du mont
Beuvray, la Vouivre
sortait de terre une fois l’an, à Pâques, et étalait ses trésors au soleil.
Pour son roman La Vouivre, Marcel Aymé s’est
vraisemblablement inspiré de la légende de la Vouivre d'Avoudrey. Outre
l'escarboucle, la créature porte une couronne de perles sur la tête, descend à
minuit, le soir de Noël, au moment où, dans l'église, on chante matines, et
vient boire à la fontaine voûtée du village. Elle pose alors un instant son
escarboucle et sa couronne au bord de la source.
Créatures considérées comme des Vouivres
Si l'on admet que « Vouivre »
puisse être un terme générique comme « dragon », alors d'autres créatures
peuvent aussi être qualifiées de « Vouivres » :
Un dragon ravageait le pays
d'Ajoie (district actuel du canton du Jura en Suisse romande), celui des Combes
(Doubs) gardait un trésor, on offrait des jeunes filles en pâture à celui de
Domfront (Orne).
Le dragon de Lissagues
(Basses-Pyrénées) tua le seigneur Gaston de Belzunce près de la fontaine ;
celui des creux du Laquet à Saint-André-de-Valborgue (Gard) était considéré
particulièrement horrible.
Et on en trouve à Douai, Vannes,
Moret-sur-Loing, Troyes, Nevers, Avignon, Cavaillon, Sisteron…
La « Bête Rô » tapie dans la
caverne de la Pointe
de Roux, près d'Aytre, dans le canton de La Rochelle en Aunis, la Kraulla de Reims, l'énorme
serpent ailé de Niort, la « Male Beste » des bords de la Garonne, le lézard monstrueux
du Médoc, le Lumeçon de Mons (Hainaut, Belgique) que combat saint Georges, les
Vermines et les Vers, les griffons à queue de serpent et les basilics (coqs à
queue de serpent), comme celui du puits de Coulaine à Claunay-le-Bouchet
(Vienne), sont d'autres avatars du Dragon-Vouivre.
Le latin médiéval donne une
variante de « crocodile », monstre des bords du Nil qui a impressionné les
voyageurs des temps passés : « cocodrilles », devenant « cocadrilles » en
Sologne et « coquatrix », ou « cocatrics » dans de nombreux endroits. L'auberge
du Coquatrix, dans le Hurepoix, maintient encore le souvenir d'une ancienne
légende. Il y aurait eu, à l'Hôtel-Dieu de Lyon, un crocodile qui fut tué sur
le Rhône, au Moyen Âge.
Les dragons et les serpents ou
les lézards vivent parfois en couple, et selon la Gest Maugis (XIIIe
siècle), le cheval fabuleux Bayart serait né de l'accouplement d'un dragon et
d'un serpent : « un dragon l'engendra ileuc en un serpent ».
À Provins (Seine-et-Marne)
vivaient un dragon et une lézarde qui sont encore fêtés de nos jours.
Mais il y a aussi la Tarasque (du grec tarasso
: épouvanter) dévoreuse, celle de Novès, terrifiante, qui ressemble à une
ancienne Tarasque étrusque, celle d'Arles et celle de Tarascon, dont la fête
est remise actuellement à l'honneur. Peut-être ces Tarasques ont-elles pour
ancêtre le serpent carnassier de trois mètres de long gravé dans une caverne
des Beaumes-Latrone, située dans une falaise abrupte de la vallée du Gard.
Dans la Légende dorée, Jacques de
Voragine, évêque de Gênes, décrit ainsi la Tarasque : « En ce temps, avoit en ung boys sur
le Rosne, entre Arles etAvignon, ung dragon, demy beste et demy poisson, plus
gros que ung beuf, et plus long que ung cheval. Et avoit les dents aguës comme
une espée, et estoit cornu de chascune part, et se tapissoit en l'eaue, et
tuoyt les passans, et noyoit les nefs… « Et quand on le suyvoit par une espace
de temps, il mettoit hors l'ordure du ventre, ainsi comme ung dart et brusloit
tout ce à quy il touchoit. Et Marthe, à la prière du peuple, alla là, et le
trouva mengeant ung homme en sa bouche. Et lors getta dessus »uy l'eaue
benoiste, et luy monstra une croix : et fut tantost vaincu, et se tint comme
une brebis, et lors Marthe le lya de sa sainture. Et fut tantost tué du peuple
à lances et à pierres, et ce dragon estoit appellé, de ceulx du pays, Tarascon,
Tarasconus. »
Louis Dumont, dans son livre La Tarasque, essai de
description d'un fait local d'un point de vue ethnographique, a étudié
minutieusement la tradition millénaire qui commémore la soumission de ce dragon
dévorant à sainte Marthe. Le chanoine Bovis la décrit ainsi : « Elle était de
la grosseur d'un taureau, ayant la teste d'un lion, le crin d'une jument, les
dents comme des épées, le dos tranchant comme une faux, la queue couleur de
vipère. Elle était couverte d'écailles comme une tortue ». Mais la Tarasque que l'on sort
actuellement pour la fête annuelle est d'un aspect beaucoup plus débonnaire.
Le Drac par exemple, qui se jette
dans l'Isère à Grenoble, était souvent cause d'inondation, et un ancien dicton
dauphinois dit : « Lo serpen e lo dragon Mettron Grenoble en savon. Il en
lessive les rives ! »13.
Coulobre
Le Coulobre (du latin coluber)
est une couleuvre ailée provençale qui vit dans les eaux de la Sorgue près de
Fontaine-de-Vaucluse14. Cette créature est réputée s'unir avec des dragons qui
l'abandonnent ensuite, la forçant à élever seule les petites salamandres noires
dont elle accouche. Elle cherche désespérément un nouvel époux et un père pour
ses enfants mais sa laideur repousse tous les prétendants. Pétrarque aurait été
attaqué par l'une de ces créatures jalouses alors qu'il se trouvait au bord de
l'eau avec sa bien-aimée : il tua lé monstre d'un coup d'épée mais sa femme
mourut ensuite de la peste. Le Coulobre est mentionné comme étant le dragon
sorti de la grotte de la fontaine de Vaucluse d'où sourd la Sorgue. Celle de
Bagnols-sur-Cèze dans le Garda sept têtes et sept queues.
Wyvern
Cette créature légendaire est semblable
à un dragon mais ne possédant que deux pattes. Son corps est principalement
celui d'un dragon avec des pattes d'aigle, des ailes semblables à celles d'une
chauve-souris et une queue de serpent barbelée.
Elle est quelquefois représentée
crachant du feu et on la décrit parfois avec une tête de coq (la rapprochant
alors de la Cockatrice)
mais plus souvent de serpent.
Son nom est issu du latin vipera
qui signifie vipère.
Il existe des variantes du Wyvern
qui sont la Merwyvern
(avec une queue de poisson) et le Lindworm (sans patte ni aile).
http://harter.audrey.free.fr/site%20mythologie%20celtique/bestiaire_fantastique.htm